Le merveilleux monde d'Isabelle

L’arrivée dans un petit village tel que celui du chef Chogan n’était jamais quelque chose qui se faisait discrètement. Les enfants arrivaient de partout pour voir les visiteurs.

« Samoset ! Samoset ! Samoset !» criaient-ils à tue tête en se ruant vers Mathias. Les enfants le connaissaient bien et ils savaient qu’il avait l’habitude de laisser trainer quelques gourmandises dans le fond de ses poches et qu’il se faisait un grand plaisir de les distribuer.

-Non, désolé, malheureusement pas cette fois… Mais attends-toi… Ho! Ho! Regarde ce qu’il y avait derrière ton oreille. Et il fit apparaître un caramel derrière l’oreille d’un des garçons dont l’expression du visage confirmait qu’il était totalement dépassé par la grande magie de Mathias. Il fouilla dans ses poches et y sorti une poignée de denrée et leur donna.

-Allez maintenant… déguerpissez !!!

Ils arrivèrent près de la tente du chef Chogan qui bien sur avait déjà été alerté par tout le brouhaha des enfants. Mais les salutations furent très brèves. Sans perdre de temps Mathias sorti la lettre de son sac et la tendis à Chogan. La vue du sceau orné de soleil et de la rose eut le même effet d’urgence sur lui qu’elle l’avait été précédemment sur Mathias.

Chogan lis immédiatement la précieuse lettre puis fit signe à un de ses hommes qui était tout prêt et lui dit « Achak chogan ! »

L’homme le regarda d’un air surpris et lui répondis d’un ton intrigué « Achak chogan ??? »

-Keegsquaw !!! Lui répondis le grand chef sur un ton qui faisait que nul n’avait besoin de connaître la langue pour comprendre qu’il lui avait dit de faire vite. Puis il s’adressa à Mathias et Samuel :

-Je vous présente Aranck, mon fils. Lui et mes hommes vous guideront jusqu'à la consoeurerie des Demoiselles. Elles vous indiqueront le chemin. Moi je vous rejoindrai plus tard. Puis il regarda vers le ciel et dit : Achak arrive…

-Qui est-ce ? demanda Mathias

-Votre moyen de transport ! dit le chef Chogan en éclatant de rire.

Mathias et Samuel regardèrent vers le ciel. Au début ils ne virent rien à mis à part les puissants rayons du soleil qui les éblouissaient. Puis tout devint noir. Les yeux encore marqué par le soleil ils virent une grande ombre se dessiner devant eux. Une ombre gigantesque … avec des ailes. Du jamais vu. Cinq immenses aigles noirs presque aussi grand que les maisons. Ils portaient tous au front une immense pierre de sang et avait le bout des ailes recouvert d’or.

À leur cou, un immense pendentif en or massif orné de symboles et de pierres précieuses. Aranck s’approchât du premier et fit balancer le pendentif vers l’avant qui se transforma en une sorte de nacelle où on pouvait facilement embarquer 2 personnes.

-Allez ! dit le chef Chogan. Il est maintenant l’heure pour vous de partir.

Samuel regarda vers Mathias et lui chuchota frêlement : «eeee... il ne faut pas vraiment… ??? »

-Oh que oui ! Répondit Mathias tout excité en poussant Samuel vers la nacelle.

Aranck et deux autres hommes montèrent eux aussi dans leur nacelle respective puis Aranck fit un cri puissant et strident.

Tous les oiseaux firent systématiquement un pas vers l’arrière et l’élancèrent vers le soleil.

-Tu as tout ? On est prêt ? demanda Elizabeth.

-J’ai tout, j’ai tout… Je ne sais même pas ce que je dois apporter, lui répondit Jacques.

- Jacques, pourtant ce n’est pas compliqué. Rose-blanche a parlé de fièvre, de grippe, de coqueluche… Prends le mercure, le genévrier, et ce qui reste de vitriol. Et aussi les décoctions de pensées, thym, framboisier… finalement prend tout. Tout ce qui reste et qu’on ne trouvera pas sur place.

Jacques fit un air innocent en se relevant les épaules qui fut aussitôt anéanti par le regard assassin d’Elizabeth.

Elizabeth était une femme de caractère. Un caractère forgé de labeur.

À l’automne de ses 17 ans elle s’était mariée, à l’hiver de ses 17 ans, elle était devenue veuve et au printemps de ses 17 ans … elle était mère.

Pendant plusieurs années elle s’était occupée seule de son fils Samuel et de la ferme. Ils avaient, en quelque sorte, tous les deux étés adoptés par Rose-Blanche. Puis un jour, arriva Jacques, qui s’offrit pour l’aider aux besognes et qui finalement n’était jamais reparti. Voila maintenant plus de cinq ans qu’il occupait le grenier de la maison. Il était travaillant, sans aucune malice et très mauvais perdant aux cartes. Ce qui amusait énormément Elizabeth. Un petit frère en quelque sorte. Elle était probablement née en ces terres mais n’avait jamais connue ses parents. Ses souvenirs d’enfance étaient très vagues.

Elle avait la peau blanche comme le lait et de grands cheveux noirs comme l’ébène. Au village, on la surnommait l’Espagnole à cause de son tempérament vif et brulant. Et ce regard… ces grands yeux noirs qui ne cachaient jamais aucune émotion et qui n’avaient aucune peine à se faire comprendre.

-Alors, ça y est ? demanda-t-elle à Jacques

-Oui mon Général. J’ai même pris des provisions… au cas.

Elizabeth se mit à rire.

-Vite! Nous sommes attendus et je ne crois pas que ce sera une partie de rigolade. Ferme la maison. Nous partons.